Marine Passignat, en direct de la 7ème Edition de la cité du luxe de l’EIML Paris
« Chaque année à lieu La Cité du luxe de l’EIML Paris. Évènement annuel qui rassemble près de 600 acteurs dans le domaine du luxe (entreprises, experts, professeurs, étudiants). C’est aussi un lieu d’échanges, de dialogues et de rencontres qui permet aux jeunes générations de s’enrichir aux contacts de professionnels et experts du secteur du luxe en traitant un sujet particulièrement d’actualité dans l’environnement du luxe.
Cette année, le sujet était la quête de sens pour les marques de luxe. Longtemps considéré comme futile et superficiel, le luxe se doit de redonner du sens pour offrir une raison, une signification et une direction à ses consommateurs qu’ils soient clients mais aussi collaborateurs, surtout quand ces derniers sont plus jeunes. Ce sujet à été traité autour de 3 tables rondes :
Table ronde n°1 : La marque de luxe est-elle encore « légitime »?
Intervenants : Thierry MOISSET CEO Laforge de Laguiole, Diane-Sophie LANSELLE Directrice com MELLERIO, Manuel MALLEN CEO Courbet et Chef Eric BRIFFARD, chef étoilé l’école du Cordon Bleu
Table ronde n°2 : La légitimité expérientielle du luxe : l’empathie de la marque
Intervenants : Shirley BILLOT PDG de Kadalys, Jean-René BOUTON PDG de Koché, Etienne-Marie de BOISSIEU PDG de Egide, Sarah TROUBAT Vestiaire Collective
Table ronde n°3 : La marque de luxe est-elle engagée ?
Intervenants : Dylan THUILLIER Compagnie des Indes Orientales, Caroline NEGRE L’Oreal, Christian LAFAGE Remy Cointreau et Magalie TREPPO Estée Lauder
L’achat de produits de luxe n’est pas épargné, alors que paradoxalement, il se définit précisément par l’absence de besoins impérieux, et par là pourrait échapper à toute justification rationnelle ou morale. Après tout, il n’est pas absolument nécessaire de donner du sens à toutes nos actions, et pas nécessairement à tous nos achats.
A une extrémité, la mission à vocation sociétale autour des notions de responsabilité, d’éthique, de protection environnementale, de développement durable. Un point de vue défendu avec brio par Manuel MALLEN, dirigeant de la maison Courbet. Mais en réalité, un fort consensus entre les intervenants de la première table ronde, malgré des enjeux différents pour les marques réunies par la Cité du Luxe.
A l’autre extrémité et à minima, la quête d’authenticité, le retour aux sources. Quel plus beau témoignage que celui de Thierry MOISSET, dirigeant de Laguiole, lorsqu’il affirme que le sens d’un produit de luxe, c’est de savoir concilier le don (les couteaux Laguiole sont beaux) et la dette (les couteaux Laguiole doivent couper). Don et dette, une quête de sens aux accents mystiques, qui fait écho aux propos de Christian GATARD, lorsqu’il affirme le retour des religions, même « bricolées ».
Entre les deux, l’humain, comme « suture », pour reprendre l’image de Christian GATARD, entre les deux tensions qui gouvernent le rapport aux marques de luxe : Apollon, qui symbolise notre volonté rationnelle à vouloir organiser le Monde et Dionysos, qui incarne notre penchant à lui préférer l’ivresse du Monde. L’humain, c’est aussi la liberté de la créatrice Sarah LAVOINE, dans l’univers de l’art de vivre, l’empathie de Thierry MOISSET pour ses ouvriers qu’il appelle ses « gars », le volontarisme de Shirley BILLIOT lorsqu’elle met en avant l’empathie des producteurs de bananes de nos territoires d’outre-mer.
Dans tous ses exemples, une même volonté : regagner la confiance du consommateur, créer du lien face à la désintermédiation introduite par les Nouvelles Technologies, avec, comme le rappelle fort justement Agathe DE MENTHON, « un impératif, la cohérence ».
En conclusion, la quête de sens dans l’univers du luxe se résumé aux quatre vertus axiologiques, que sont le Vrai, le Bon, le Beau, les trois dimensions autour desquelles se déploie toute véritable croissance de l’homme intérieur, pour résumer la philosophie platonicienne. Il s’agit pour les marques de luxe d’avoir des idées justes (le Vrai), de les incarner dans leur conduite (le Bon), et pour éviter que cela ne reste qu’un système de pensées et de règles morales, il convient d’y ajouter le Beau. Longtemps considéré comme futile et superficiel, le Luxe se doit de redonner du sens pour offrir une raison, une signification et une direction à ses consommateurs, qu’ils soient récemment conquis ou connaisseurs de longue date. La quête de sens peut aussi signifier l’envie d’humaniser la marque, de la rendre empathique, foncièrement honnête dans ses relations avec ses différents interlocuteurs, qu’ils soient clients mais aussi collaborateurs, surtout quand ces derniers sont plus jeunes.
Cette journée repose sur un triple objectif :
Offrir une tribune aux étudiants car au-delà de leur demander de choisir un thème annuel de réflexion et de leur donner la parole lors de la journée, les étudiants de l’EIML ont travaillé tout au long de leur année scolaire sur le sujet porté, non seulement dans le cadre de projets en lien avec leurs cours à l’école, mais aussi à travers leurs travaux de mémoires de recherche ;
Faciliter l’insertion professionnelle des étudiants au sein de ce secteur réputé comme impénétrable, encourager l’évolution des jeunes diplômés dans ce secteur de passion en les incitant à rencontrer et à débattre au sein même de leur établissement avec des professionnels du luxe notamment
Contribuer à la transformation de ce secteur du luxe parfois perçu comme étant un peu traditionnel, grâce à la jeunesse de cette génération qui prend toutes choses avec objectivité et hauteur de vue mais aussi depuis 2018, avec la création du laboratoire de recherche en marketing du luxe à l’EIML Paris grâce aux chercheurs en sciences de gestion présents également lors des débats. Les contenus émanant de la cité du luxe orientent et nourrissent en effet les équipes de professeurs chercheurs dans l’objectif de produire des livres blancs, contributions intellectuelles et productions académiques destinés aux praticiens et acteurs du luxe.
Finalement, l’objectif est de sortir de ce lieu de rencontres, différents, stimulés et motivés par les propos de personnalités qui font le luxe actuel et à venir », Elodie de Boissieu, Directrice EIML Paris.